Une fin d’Empire inattendue
Posée en 1970 par Andreï Amalrik, la question de la « survie de l’URSS en 1984 » n’apparaissait alors guère pertinente aux analystes des relations internationales. Malgré le succès de librairie rencontré en 1978, L’Empire éclaté (1) d’Hélène Carrère d’Encausse n’emportait pas la conviction des experts en soviétologie. Les années 1970 avaient même vu les Soviétiques marquer des points dans la confrontation Est-Ouest. La conférence d’Helsinki avait confirmé les frontières européennes établies à l’issue de la Seconde Guerre mondiale et ouvert avec l’Occident une coopération économique et financière favorable aux intérêts de Moscou.
La « troisième corbeille » des accords débouchant sur la détente prévoyait bien la libre circulation des hommes et des idées, ainsi que le respect des « droits de l’homme », mais la nomenklatura dirigeante ne s’inquiétait guère alors de ces concessions jugées purement formelles. Les années suivantes virent les Soviétiques poursuivre leur montée en puissance sur le terrain militaire et s’installer dans des régions du monde – au Vietnam, en Afrique, dans l’océan Indien – demeurées jusque-là pour eux hors de portée.
La suite de l'éditorial de Philippe Conrad