Cinéaste français, réalisateur, entre autres, de Le Crime est notre affaire (2008), ancien patron de la Société des réalisateurs de films, Pascal Thomas réagit aux polémiques qui accompagnent la suppression de la publicité sur les chaînes publiques à partir du 5 janvier. :
"La suppression de la publicité sur les chaînes publiques est inattendue. Je l'imaginais impossible, étant donné la conformité des esprits à la "bien-pensance" publicitaire. Elle est essentielle. A mes yeux, c'est comme si on avait démantelé une filière importante de la drogue. Nombre d'entreprises la jugent indispensable ! La publicité dévore l'entreprise, change son caractère. Regardez ce que sont devenus les journaux, les films, l'édition, le commerce, bref la société en général. Le pire triomphe de la publicité est d'avoir perverti les esprits et surtout imposé la dictature de l'Audimat, au point que chacun pense ne pas pouvoir s'en passer. A écouter les gens qui débattent et qui ont fait leur cirque à l'Assemblée, on a le sentiment que les choses ont toujours été ainsi. Alors que cette forme de financement ou de soutien aux entreprises a moins d'un demi-siècle. En ce qui concerne la télévision, le nombre d'effets pervers a été considérable, allant du formatage, un asservissement de l'œil et de l'esprit, aux formes trop brèves pour entraîner une réflexion. [...]
Vous contestez le talent des gens en place ?
Ils sont responsables de la médiocrité télévisuelle depuis tant d'années ! Là aussi, il faudrait faire table rase. [...] La publicité, on le sait, est en crise. D'abord parce qu'elle a lassé, ensuite parce qu'elle est le produit d'une société dépensière, obscène, profitant de la crédulité des gens, qui n'a plus lieu d'être aujourd'hui. [...] On ne mesure pas assez ce que pourrait être un espace télévisuel où seront absents les films publicitaires. Si on le veut bien, ce sera la liberté de création retrouvée. Tout est possible. C'est l'usage qui crée la forme de la culture. On pourra même s'attacher à la beauté, on pourra même retourner aux films en noir et blanc que la télévision commerciale a tués, revenir à des films qui plairont au petit nombre comme au grand nombre."
MJ