En Europe, 6% de la population souffre de troubles de l’audition. En France, l’un des précurseurs de l’enseignement spécialisé dispensé aux sourds fut Charles-Michel de L’Epée.
L’abbé Charles-Michel de L’Épée naquit à Versailles, où son père tenait une charge d’architecte du Roi, le 24 novembre 1712. Après des études de théologie et de droit, il mena une existence de polémiste janséniste, assez obscure il faut bien le reconnaître, participant même aux controverses sur les convulsionnaires du cimetière Saint-Médard.
En 1760, Charles-Michel (il changea son nom de famille, « Lespée », en « de L’Épée » vers vingt ans) se rendit dans une maison dans laquelle habitaient des jumelles. Apprenant qu’elles étaient sourdes et que le Père Vanin, leur précepteur, venait de mourir, il se proposa de les recevoir, chez lui, pour les instruire, « faire leur salut » et leur donner l’« intelligence des mots » ; en fait, poursuivre l’enseignement des « vérités de la Foi », commencé par le Père Vanin.
Comme elles étaient sourdes, elles s’entretenaient, sans aucun doute, par signes. Elles devaient, également, communiquer gestuellement avec leur mère, comme cela est coutumier entre mère et filles sourdes. L’Épée jugea donc raisonnable d’utiliser leurs signes, à condition néanmoins de les changer un peu, de les rendre acceptables, « civilisés » en quelque sorte. Ainsi, mit-il au point tout un système de traduction de la grammaire française et du catéchisme en langage des signes gestuels : les « signes méthodiques ». Méthodiques car assujettis à une méthode, celle de Descartes, bien entendu, qu’on lui avait enseignée lors de ses études au collège des Quatre-Nations, alors qu’il avait seize ans.