Depuis son apparition dans le paysage intellectuel, la théorie de l’évolution a soulevé de multiples questions et continue de le faire. Ce n’est pas comme pour une découverte scientifique habituelle, cantonnée à un domaine de connaissances précis. En transformant la vision que l’homme avait de lui-même, en particulier de son origine, l’évolution eut ses répercussions sur tous les aspects de nos sociétés. Elle a dicté leurs grands choix aux idéologies politiques du XXe siècle ; elle a justifié le libéralisme économique aussi bien que le collectivisme, toujours actifs avec leurs excès et la déshumanisation des sociétés qui en a résulté. Les religions elles-mêmes ont dû réagir, chacune à sa façon.
Pourtant la manière dont l’évolution est présentée, tant dans les manuels que dans les médias, est souvent lacunaire, complaisante, incompatible avec l’esprit critique propre à la méthode scientifique. Ce petit livre propose au lecteur un ample tour d’horizon balayant tout le paysage de l’évolution en dix chapitres comportant chacun dix questions précises, avec autant de réponses claires et directes, argumentées sur des faits et de nombreuses références. Bref, une synthèse documentée et, surtout, permettant de comprendre ce qui est en cause derrière les mots de la thèse évolutionniste.
Ingénieur des Mines de Paris, ayant soutenu en Sorbonne une thèse de philosophie sur la dialectique de la science et de la Révélation (De Galilée au Père Lagrange), Dominique Tassot s’est passionné pour les rapports complexes qu’entretiennent la science et la foi. Il anime le Centre d’Études et de Prospective sur la science (CEP) dont il dirige la revue Le Cep.
Cet outil y a surgi de manière anodine comme un nouveau mode de communication et de transmission, rapide, facile, pratique, efficace. Mais comme toujours avec l’évolution de l’informatique il n’est pas qu’un moyen comme les autres, au sens habituel du monde « d’hier ». La révolution technologique est passée par là. Il y a un empire du mail. C’est tout l’intérêt du livre que Jean Grimaldi d’Esdra vient de publier[1] et à la lecture duquel je ne saurais trop vous engager.
À travers une analyse systématique, documentée, sans a priori, l’auteur démonte ce phénomène en le prenant dans tous ses aspects. Sa grande expérience des relations humaines en entreprise donne à son travail toute sa richesse et son épaisseur.
Quelles sont les caractéristiques de cet empire ? La destruction de nos repères, des barrières classiques, des paradigmes. Il chamboule tout mais nous l’utilisons sans avoir réalisé l’ampleur de la révolution qu’il constitue et sans avoir réfléchi à ses répercussions.
Il y a tout d’abord le volume, le nombre, et la possibilité de choisir les niveaux de diffusion qui permettent de transformer la géographie des envois et des réceptions. La communication individuelle et personnelle change d’univers, de paysage. De ce fait, elle donne des moyens, des pouvoirs nouveaux.
Le mail provoque l’accélération et bouleverse notre rapport au temps ; il nous inscrit dans la logique du mouvement propre à notre époque.
Le mail, bien qu’il soit écrit, n’est plus l’écrit au sens classique du terme tel qu’il naquit de l’imprimerie. À n’en pas douter, la révolution qu’il apporte de ce point de vue sera aussi importante que celle provoquée par Gutenberg, malgré les apparences. Le support change tout.
Mais le message électronique chamboule également la relation physique, orale entre les personnes. Il la refuse, la choisit, la manipule. On choisit de parler ou non. On choisit son moment… On parle en écrivant tout en se cachant derrière son écran.
Il remet en cause les conditions de travail en s’attaquant à la sphère privilégiée dans laquelle la réflexion s’organisait ; il perturbe la concentration. Je le vis à titre personnelle dans ma vie d’avocat, au quotidien… Il privilégie la rapidité sur la qualité ; le tout étant de répondre ou d’envoyer un message dont le contenu passe au second plan.
Il fait également exploser les barrières entre vie privée et vie professionnelle.
Il ouvre des champs nouveaux à des méthodes de management, de pression, de harcèlement, dont de nombreux contentieux prudhommaux sont l’illustration mais aussi sur le plan personnel comme par exemple dans la relation affective ou amoureuse, notamment dans les couples qui se font et se défont sous les coups de boutoir de messages dévastateurs.
Il génère de nouveaux phénomènes d’aliénation en même temps que d’addiction.
Il permet de créer des barrières là où il n’y en avait pas, après en avoir détruit d’autres.
Après avoir décortiqué ce phénomène sans rien laisser de côté, au prix d’un travail qui est à la fois enquête et réflexion, et qui invite l’histoire comme la philosophie et la psychologie, l’auteur nous renvoie pour finir à nous-mêmes et à notre capacité de résistance. L’empire da mail peut-il devenir l’empire du mal ? Cela ne dépend que de nous… Au fond l’auteur nous pose la question de notre maîtrise de cet outil qui n’en est plus un. Comment résister à son emprise, à son empire ? Comment conserver notre pouvoir sur nos vies sans succomber aux pièges que la technologie tend à notre humanité ? Cela est vrai plus généralement dans notre relation à l’égard de la technique, de l’informatique, de la robotique et de l’intelligence artificielle. Nous sommes au cœur de la réflexion à mener face à la mutation que l’informatique provoque dans les relations humaines, avec nous-mêmes, avec les autres, avec notre travail, avec le monde.
L’homme a rendez-vous avec lui-même en ce début de XXIe siècle. A nous de ne pas le manquer. La lecture de ce livre nous y aidera.
Ou plutôt son créateur, l’écrivain Charles-Henri Dewisme, dit Henri Vernes.
Il avait vu le jour le 16 octobre 1918 à Ath (Belgique) et s’est éteint ce 25 juillet.
Auteur de plus de 230 romans d’aventures sous différents pseudonymes, il connut un immense succès auprès des jeunes adolescents des années 60-70 avec Bob Morane, un aventurier qu’il emmena non seulement aux quatre coins de la planète mais aussi dans l’espace, dans le passé et dans futur.
Le futur Henri Vernes, à l’image de Bob Morane, était un personnage.
Il quitta le plat pays qui était le sien à l’âge de 19 ans pour l’amour de Madame Lou, une Chinoise de dix ans son aînée, rencontrée à Anvers. Marseille, puis la Chine. Un parfum d’Ylang-Ylang.
Présentation Les catastrophes écologiques ont eu raison de la civilisation humaine. Les rares survivants se sont organisés en une micro-société qui veut rejeter les erreurs du passé.
Dans cette communauté sans Dieu où l'homme est mis sur le même plan que les animaux, le jeune Narval découvre un message secret laissé par sa mère disparue : «ilasouffertsousponcepilate ».
Pourquoi il faut l'emporter cet été Selon le blog La Passer'Ailes Littéraire, "ce livre ne se lit pas mais se dévore d'une traite".
Le dernier roman d'Anne Kurian nous entraîne cette fois-ci dans un nouveau monde d'une richesse inouïe et une aventure palpitante.
L'évangélisation de la Gaule a commencé dès le premier siècle, comme le confirment de récentes découvertes archéologiques. Son histoire s'ouvre avec l'arrivée en Provence, d'une barque transportant Lazare de Béthanie, ses sœurs et quelques amis. Elle se poursuit avec l'envoi, par saint Pierre, de sept missionnaires ; puis le mouvement amorcé s'amplifie et de nombreux et intrépides messagers de l'Evangile sillonnent la Gaule en tous sens, souvent au péril de leur vie. Peu connus, ils sont pourtant les pierres de fondation des futurs diocèses, comme le raconte Francine Bay dans des récits captivants richement illustrés. Un livre qui permet à tous de découvrir les profondes racines chrétiennes de la France. A propos de Francine Bay :Mère de famille nombreuse, catéchiste, elle est l'auteur de 25 livres, récits d'apparitions et vies de saints, histoire de l'Eglise, dont le succès ne se dément pas.
Le 8 juillet 1621, il y a tout juste 400 ans, naissait Jean de La Fontaine. Fabuliste et poète génial admiré aussi bien par les enfants que par les adultes, il est aussi le penseur de la condition politique des hommes, c'est-à-dire de l'homme comme «animal politique». «Animal politique» désignant l'homme comme être d'emblée pris dans le faisceau des relations humaines (*). Son premier recueil est dédicacé à Louis de France, fils de Louis XIV, âgé de 6 ans. La première fable de ce recueil est « La cigale et la fourmi » que Jacques Trémolet de Villers, écrivain et avocat, nous commente avec brio.
« La Cigale et la Fourmi » est la première du premier livre des fables, et, sans concurrence aucune, la plus fameuse. Rousseau, qui écrivait très bien et pensait très faux, lui reprochait d'être inexacte, quant aux mœurs supposées des deux bêtes, et immorale, quant à la leçon tirée.
La postérité s'est moquée de Rousseau. Le cœur, bien sûr, est du côté de la Cigale. Personne n'aime la Fourmi. Mais aime-t-on le vinaigre, le sel tout pur et surtout aime-t-on la morale? Il faut être niais comme un philosophe allemand, et plus ennuyeux encore, pour s'éprendre de la morale. La morale ne vaut que par la fin qu'elle poursuit.
Mais La Fontaine ne fait pas, comme le croyait Rousseau, la morale. Il ne délivre pas de message à l'humanité. Il s'adresse aux petits princes et les éduque, en leur apprenant à voir. A voir les comportements. A observer. La morale, ils se la feront après, tout seuls. La Fontaine raconte de petites histoires, dresse des tableaux légers. Il suffit de les contempler; ces tableaux parlent d'eux-mêmes.
La Cigale, ayant chanté
Tout l'été,
D'abord, pauvre Jean-Jacques, admirez ! Admirez ce que, vous ne savez pas faire et qui est ce concentré de poésie, laquelle est déjà du concentré, de l'essence, comme on dit d'un parfum. Elle ne s'étale pas comme le discours en prose. Elle ne se répand pas, odieusement satisfaite d'elle-même, prédicante et suffisante.
Se trouva fort dépourvue
Quand la bise fut venue :
En quatre vers tout aussi brefs, voici que sont campés à la fois le décor, le caractère, et le drame. Les enfants n'apprendront jamais assez cet art de la concision, du ramassé, qui est le dernier mot de l'intelligence et le trait spécifique de l'esprit ailé, gaulois.
Pas un seul petit morceau
De mouche ou de vermisseau.
Rien de rien !
Elle alla crier famine
Chez la Fourmi sa voisine,
Ça continue, aussi vif, sans aucune redite, cheville, sans aucun ralentissement, ni de la pensée ni de la description.
La priant de lui prêter
Quelque grain pour subsister
Jusqu'à la saison nouvelle.
« Je vous paierai, lui dit-elle,
Avant l'oût, foi d'animal,
Intérêt et principal. »
Nous avons déjà trouvé cet août. C'est la date de la moisson, qui rythme la vie économique. On compte en moisson, car c'est à la moisson que l'on sait de quoi on dispose, en principal et en intérêt. Il faut expliquer aux enfants cette règle du prêt à intérêt, qui, pendant longtemps, fut prohibé par l'Église, comme contraire à la fois au précepte de l'Écriture et à la nature. L'argent ne crée pas l'argent. Seule la moisson fait la richesse. Le laboureur le dit à ses enfants. C'est la règle fondamentale de la saine économie : le travail est le seul trésor.
La Fourmi n'est pas prêteuse;
C'est là son moindre défaut.
Entendez, c'est le défaut qu'elle a le moins... Bien sûr, c'est ironique !
« Que faisiez-vous au temps chaud ?
Dit-elle à cette emprunteuse.
Nuit et jour à tout venant
– Je chantais, ne vous déplaise.
– Vous chantiez ? J'en suis fort aise :
Eh bien, dansez maintenant! »
dit la Fourmi qui n'a jamais su chanter et a passé son été à amasser.
En enseignant à Monseigneur le Dauphin ce qui est et non qu'on voudrait qui fût, La Fontaine fait œuvre saine et pieuse. Il ne lui fait pas réciter les droits de l'homme – le droit de la Cigale à manger sans travailler, le droit de la Fourmi à chanter aussi bien que la Cigale. Il lui enseigne la diversité – l'inégalité, eh oui ! – des êtres et des choses, des types et des classes, des espèces et des nations. Il lui montre la vie, la vraie vie, pour qu'ensuite, il puisse, au mieux, gouverner.
Pas d’idéologie chez La Fontaine. La vérité, nue vive, sèche, souvent amère.
Ce petit prince était bien élevé.
dans Heureux qui comme Ulysse …Editions Martin Morin,1998
(*) : cf Pierre Boutang (1916-1998), philosophe et écrivain, auteur de La Fontaine politique
Rien ne sert de courir ; il faut partir à point.
Le Lièvre et la Tortue en sont un témoignage. Gageons, dit celle-ci, que vous n'atteindrez point Sitôt que moi ce but. — Sitôt ? Êtes-vous sage ? Repartit l'animal léger. Ma commère, il vous faut purger
Avec quatre grains d'ellébore.
— Sage ou non, je parie encore.
Ainsi fut fait : et de tous deux
On mit près du but les enjeux :
Savoir quoi, ce n'est pas l'affaire,
Ni de quel juge l'on convint.
Notre Lièvre n'avait que quatre pas à faire ;
J'entends de ceux qu'il fait lorsque prêt d'être atteint
Il s'éloigne des chiens, les renvoie aux Calendes,
Et leur fait arpenter les landes.
Ayant, dis-je, du temps de reste pour brouter,
Pour dormir, et pour écouter
D'où vient le vent, il laisse la Tortue
Aller son train de Sénateur.
Elle part, elle s'évertue ;
Elle se hâte avec lenteur.
Lui cependant méprise une telle victoire,
Tient la gageure à peu de gloire,
Croit qu'il y va de son honneur
De partir tard. Il broute, il se repose,
Il s'amuse à toute autre chose
Qu'à la gageure. À la fin quand il vit
Que l'autre touchait presque au bout de la carrière,
Il partit comme un trait ; mais les élans qu'il fit
Furent vains : la Tortue arriva la première.
Eh bien ! lui cria-t-elle, avais-je pas raison ?
De quoi vous sert votre vitesse ?
Moi, l'emporter ! et que serait-ce
Si vous portiez une maison ?
Jean de La Fontaine, Les fables de La Fontaine, ill. Thomas Tessier
Le totalitarisme s’installe petit à petit dans nos démocraties libérales. La période de mise sous contrôle de notre vie privée durant la crise du COVID, le pass sanitaire, les lois bioéthiques adoptées sans vrais débats ouvrant la porte au transhumanisme et à la marchandisation des corps, les réunions «non mixtes racisées» à l’UNEF en sont autant d’exemples. L’écrivain américain et journaliste, Rod Dreher, auteur du Pari bénédictin en 2017, nous invite à la résistance dans son nouveau livre, Résister au mensonge (Edition Artège) .
Ces mensonges (que je dénonce), au pluriel, sont une collection de dogmes connexes que la gauche veut nous voir proclamer pour prouver que nous ne sommes pas des sectaires barbares, (…) comme (…) l’idéologie du genre (par exemple, l’idée que l’identité sexuée est une complète construction sociale) ou (…) que les choses les plus importantes à connaître d’une personne sont sa race, son inclination sexuelle et d’autres marqueurs superficiels de son identité plutôt que le fond de son caractère. (…)
En 1951, Hannah Arendt a publié les Origines du totalitarisme, les résultats de son étude sur la façon dont l’Allemagne, la Russie et l’Italie ont accepté les systèmes totalitaires. Elle a découvert certains aspects que les sociétés prétotalitaires ont en commun. Les facteurs les plus importants sont la solitude de masse et l’aliénation. L’homme prétotalitaire est isolé de son voisin, étranger à sa propre culture et à ses traditions, et manque de sens et de but dans sa vie. C’est assez courant dans nos pays occidentaux postchrétiens, comme Michel Houellebecq l’a montré mieux que quiconque.
Un autre facteur important est l’effondrement de la confiance dans les institutions (…) Un désir de transgresser par souci de transgression est aussi un signe d’un totalitarisme sur le point d’advenir. Arendt disait que dans les pays prétotalitaires, les élites étaient prêtes à détruire les piliers d’une civilisation pour la satisfaction de voir des gens qui avaient été exclus se faire une place.
Autre chose : une indifférence envers la vérité et une ardeur à croire n’importe quoi qui conforterait dans ses propres partis pris. (…) Quand les gens cessent de se préoccuper de savoir si leurs dirigeants leur mentent, ils sont prêts à accepter des mensonges systématiques qui leur volent leur liberté, mais qui leur donnent un sentiment d’appartenance, un sens, un but. (…)
Nous faisons l’erreur de croire que le totalitarisme implique un État stalinien (…) avec des goulags, une police secrète, de la torture. Or, ce n’est pas cela. En fait, même une démocratie libérale peut, en principe, être totalitaire. Une société totalitaire est une société dans laquelle le pouvoir politique est monopolisé par un seul parti ou une idéologie. (…)
Le gauchisme culturel militant (l’idéologie « woke ») (…) a été désigné comme le “successeur idéologique” du progressisme. Les élites ont accepté cette idéologie et emploient leur pouvoir à l’imposer à tous. Il n’y a pas de tolérance : si vous osez être dissident, ils utiliseront leur pouvoir pour vous punir, en détruisant votre réputation, votre entreprise ou votre avenir professionnel. Vous serez dénoncé comme raciste, homophobe, transphobe, et ainsi de suite. Vos amis pourraient vous laisser tomber par peur d’être accusés à leur tour. Tout ceci est malheureusement familier à ceux qui ont vécu sous le joug communiste. (…)
La chose la plus déroutante au sujet de la nouvelle idéologie “woke” est que c’est une contrefaçon de la sollicitude chrétienne envers les plus faibles. En tant que chrétiens ou au moins en tant qu’héritiers d’une civilisation qui était jadis chrétienne, la plupart d’entre nous croient en l’importance de défendre les plus faibles, les parias, les victimes. Mais cette nouvelle idéologie essaie d’être plus chrétienne que le Christ, donnant aux victimes – ou plutôt, à ceux à qui elle octroie le statut de victime – la valeur ultime. Soljenitsyne disait qu’il avait appris au goulag que la ligne de partage entre le bien et le mal traversait le cœur de chaque être humain. La nouvelle idéologie, comme le communisme, place cette ligne de partage entre les groupes sociaux : pour les communistes entre les bourgeois et les prolétaires, pour les “woke” entre les hétérosexuels blancs chrétiens et tous les autres. La logique est la même. (…).
Le capitalisme de surveillance mise sur une observation étroite de tout ce que chacun de nous fait sur Internet, avec nos smartphones et nos ordinateurs, pour collecter des données sur nos habitudes et les utiliser pour mieux nous faire acheter des choses. Les entreprises collectent constamment une quantité vertigineuse de nos données personnelles, toutes légalement, et les utilisent à des fins marketing. Leurs algorithmes sont devenus extrêmement précis pour prédire ce que nous aimons et ce que nous allons probablement faire. C’est assez sinistre, mais nous l’acceptons comme une condition de la modernité. Très peu soulèvent des objections contre ces agissements. La plupart des gens semblent les apprécier, parce que cela rend la vie plus pratique.
Mais que se passera-t-il si ces données sont utilisées pour nous persécuter politiquement, comme c’est le cas en Chine ? Peut-être avons-nous la certitude que la loi nous en protégera, mais que se passera-t-il lorsque les sociétés “woke” décideront de ne plus avoir d’échanges économiques avec des gens qui conservent nos valeurs et croyances, comme l’indiquent les sites que nous visitons, les choses que nous lisons, les gens avec qui nous sommes amis sur les réseaux sociaux et ainsi de suite ? Kamila Benda, une ancienne dissidente anticommuniste à Prague, me disait qu’il n’y avait rien de tel que la collecte innocente d’informations. Toutes les choses que les gens au pouvoir – que ce soit au sommet de l’État ou à la tête d’une grande entreprise – apprennent sur nous peuvent être utilisées contre nous. (…).
J’espère me tromper, mais je ne pense pas que nous pouvons arrêter ce qui arrive. Mais nous pouvons refuser que cela nous conquière. Dans un message de 1974 à ses partisans, juste avant que les Soviétiques ne l’expulsent de son pays, Soljenitsyne leur a dit que bien qu’il fût vrai qu’ils ne pouvaient renverser le système totalitaire, ils pouvaient au moins refuser de participer à la culture de mensonges. On peut ne pas pouvoir exprimer ses opinions en public, mais on peut au moins refuser de dire des choses en lesquelles on ne croit pas. C’est là que la résistance commence. Mais (…) nous pouvons faire plus que cela. Nous devons trouver le courage de dire non, de dire que nous ne sommes pas d’accord avec cette idéologie – l’idéologie du genre, la prétendue idéologie antiraciste (qui est en réalité une forme de racisme de gauche) et le reste. (…). Et, c’est tellement important, nous devons être préparés à souffrir pour la vérité. Les anciens dissidents m’ont dit que si nous n’étions pas préparés à souffrir, nous étions déjà vaincus. Nous devons aussi, comme les dissidents l’ont fait, former de solides petits groupes solidaires partageant un but commun, côte à côte quoi qu’il arrive. Nous avons besoin les uns des autres pour être assurés que nous ne sommes ni fous ni seuls.
Extraits de l’entretien dans Valeurs Actuelles du 3 juin 2021
Un roman drôle et spirituel, écrit par une des plus jolies plumes du moment, à la découverte des incroyables mystères de l’au-delà.
Aujourd’hui est un grand jour ! Après s’être demandé toute sa vie ce qui se passait après la mort, Marie-Lou vient de passer de l’autre côté du voile. Commence alors la plus formidable aventure de toute sa vie… éternelle. Entre stupeur, crainte et émerveillement, notre héroïne va faire les rencontres les plus inattendues, découvrir les mystères de l’au-delà et vivre enfin ce fameux « jugement » qu’elle redoutait tant. La miséricorde aura-t-elle le dernier mot ?
Un roman initiatique, drôle et profond, sur les péripéties d’une âme face à la mort et à la vie éternelle.
L’après-crise du COVID ne semble pas se présenter sous des auspices très roses avec ses « pass sanitaires », ses contrôles en tout genre grâce à l’intelligence artificielle … Et pourtant, il existe des intellectuels qui voient les prochaines années d’une manière plus optimiste. C’est le cas de l’essayiste britannique David Goodhart qui, dans son livre La tête, la Main et le Cœur (éditions Les Arènes, 475p, 2020) critique la prédominance dans nos sociétés occidentales du « travail cognitif » (la tête) au détriment des métiers manuels ou sociaux (la Main et le Cœur) et prédit une meilleure harmonie entre ces trois domaines dans les dix prochaines années.
En voici des extraits :
La plupart d’entre nous aimeraient que les choses reviennent à la normale aussi rapidement que possible (après la crise sanitaire), mais les prochaines années vont sans aucun doute être un moment charnière en matière politique dans les riches pays d’Europe et d’Amérique du Nord (…). Celle-ci va permettre à la Main (le travail manuel) et au Cœur (le travail du soin), (…) de récupérer par divers moyens une partie du prestige et des gratifications qu’ils ont perdus au fil des dernières décennies au bénéfice de la Tête (le travail cognitif).
La société occidentale est dominée depuis deux générations par des forces centrifuges qui ont diffusé le concept d’ouverture mondiale et de liberté individuelle, mais ont affaibli les liens collectifs et ont permis au travail de la Tête de s’approprier des gratifications indues, tandis que le travail de la Main et du Cœur perdait du terrain tant en matière de dignité qu’en matière de rémunération. L’économie de la connaissance a placé la méritocratie cognitive au centre de la hiérarchie des statuts, et ceux qui avaient eu la chance de recevoir un bagage cognitif conséquent ont pu s’épanouir pendant que de nombreux autres avaient l’impression d’avoir perdu leur place et leur sens.
De récentes tendances politiques, certainement renforcées par la pandémie de Covid-19, laissent penser que nous sommes en train d’intégrer une phase plus centripète dans laquelle l’État nation sera raffermi, et l’ouverture économique et culturelle un peu plus restreinte. Cette phase mettra en valeur le local, la stabilité sociale et la solidarité ; elle se montrera plus sceptique face aux revendications des représentants de la Tête, et plus sensible aux humiliations amères qui minent la société de la réussite moderne.(…)
Pour le dire en termes politiques, je vois cette crise, particulièrement en Europe, comme un élément qui va consolider une coalition inattendue – la préférence conservatrice pour le local, le national, le familial, d’un côté, et la prédilection de la gauche pour une augmentation des dépenses sociales et un certain collectivisme doublée d’un regain d’inquiétude pour l’environnement, de l’autre. (…)
L’une des forces motrices de changement est la pression politique de la part d’électeurs qui ne partagent pas les intérêts de la classe cognitive. Et d’autres tendances laissent penser que la Tête va bientôt affronter la Main et le Cœur à armes plus égales.(…)
Le monde politique va devoir affronter, dans les dix prochaines années, une vérité dérangeante. Les partis de centre gauche comme de centre droit parient sur une expansion des emplois sûrs, comme les emplois de cadres et les professions libérales. Les politiques de l’éducation et de la mobilité sociale sont fondées sur cette hypothèse. Et c’est presque certainement faux. L’économie de la connaissance n’a pas besoin d’être constamment alimentée en main d’œuvre savante. Et ce sont précisément les aspects les plus systématisés du travail dans les domaines du droit, de la comptabilité, de la médecine, de l’administration publique et ainsi de suite qui seront, dans un futur proche, vulnérables à la fois à l’intelligence artificielle et à l’exportation vers des économies à la main-d’œuvre moins rémunérée. Un comptable est bien plus facile à remplacer par un algorithme qu’un éboueur ou une puéricultrice.
La rapide expansion du secteur universitaire traditionnel des trente dernières années pourrait s’arrêter et s’inverser. Déjà, au Royaume-Uni, cinq ans après leur sortie de la faculté, presque un tiers des diplômés occupent des emplois qui ne demandent aucun diplôme (le pourcentage est le même aux États-Unis), et pour les jeunes hommes sortis d’universités ordinaires, du point de vue salarial, l’avantage d’être diplômé est quasiment nul par rapport à leurs homologues qui n’ont pas fait d’études.(…) L’automatisation a jusqu’à présent tué essentiellement des emplois ouvriers, mais l’intelligence artificielle commence à toucher les emplois intellectuels dans leurs aspects les plus routiniers. (…)
(L’idée que) la Tête, la Main et le Cœur, ou la réflexion, le travail manuel et les sentiments, sont séparés les uns des autres (…) n’est pas vraie, et l’ère cognitive souffre justement d’un cloisonnement trop rigide entre les trois. Une foule de métiers de la Main requièrent énormément de Tête. Matthew Crawford, le philosophe américain (…) et qui a quitté un laboratoire d’idées pour monter un atelier de réparation de motos, explique qu’il a trouvé le travail manuel spécialisé bien plus exigeant mentalement que son travail intellectuel sur la philosophie politique. Il décrit avec amour le raisonnement diagnostique qu’il utilise pour trouver la panne dans le moteur d’une moto italienne vintage – ce qui lui demande d’exercer son esprit logique, son expérience et parfois son imagination. C’est tout aussi valable pour la Tête et le Cœur.(…).
L’une des faiblesses persistantes des politiques libérales modernes consiste à trop s’appuyer sur un seul membre de ce triumvirat – sur un utilitarisme étriqué dépourvu de Cœur. (…). Au cours des dernières décennies, (la politique) a été trop dominée par une classe cognitive tournée vers la complexité cognitive et tout ce qui est quantifiable, ce qui a trop souvent conduit à un rationalisme et un économisme bornés. (…)
Les gens privilégiés, ou qui ont très bien réussi, ont souvent moins de raisons de se poser de grandes questions sur les valeurs ; ils dégagent parfois une certaine indifférence ou une impression d’invulnérabilité. Mais la perte et l’échec sont de bons professeurs. Dans La vie est belle de Franck Capra, ce n’est que lorsqu’il est au plus bas que James Stewart voit la vraie valeur de sa vie et de sa famille. (…)
Il nous faudra de la sagesse tout au long du chemin. On pourrait croire que ceux qui ont les processeurs mentaux les plus rapides étayent leur réflexion avec leur puissance cognitive et par conséquent sont les plus sages ; mais de volumineuses recherches révèlent que l’intelligence brute et la sagesse ne vont pas forcément de pair, en tout cas pas à tous les coups. (…). La sagesse s’exprime souvent en contrepoint de l’idéologie.
Extraits du livre La Tête, la Main et le cœur de David Goodhart
Mon enfant, ma sœur,
Songe à la douceur
D’aller là-bas vivre ensemble !
Aimer à loisir,
Aimer et mourir
Au pays qui te ressemble !
Les soleils mouillés
De ces ciels brouillés
Pour mon esprit ont les charmes
Si mystérieux
De tes traîtres yeux,
Brillant à travers leurs larmes.
Là, tout n’est qu’ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté.
Des meubles luisants,
Polis par les ans,
Décoreraient notre chambre ;
Les plus rares fleurs
Mêlant leurs odeurs
Aux vagues senteurs de l’ambre,
Les riches plafonds,
Les miroirs profonds,
La splendeur orientale,
Tout y parlerait
À l’âme en secret
Sa douce langue natale.
Là, tout n’est qu’ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté.
Vois sur ces canaux
Dormir ces vaisseaux
Dont l’humeur est vagabonde ;
C’est pour assouvir
Ton moindre désir
Qu’ils viennent du bout du monde.
– Les soleils couchants
Revêtent les champs,
Les canaux, la ville entière,
D’hyacinthe et d’or ;
Le monde s’endort
Dans une chaude lumière.
Là, tout n’est qu’ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté.
Note liminaire
I. Libéralisme en général et libéralisme économique ; Le capitalisme
II. Les lois de l'économie libérale
III. L'école française du libéralisme : Quesnay ; Les physiocrates
IV. L'école anglaise du libéralisme : A. Smith ; Malthus
V. L'école anglaise du libéralisme : B. Ricardo ; Stuart Mill
VI. Le néo-libéralisme du XXe siècle
VII. Socialisme éternel et socialisme économique
VIII. Le socialisme du XVIIIe au XIXe siècle
IX. Le socialisme français du XIXe siècle
X. Le marxisme A- La théorie économique
XI. Le marxisme B- La philosophie révolutionnaire
XII. Le socialisme au XXe siècle
XIII. La double interrogation de Schumpeter : Le capitalisme peut-il survivre ? ; Le socialisme peut-il fonctionner ?
Bibliographie
Index des noms cités
Louis Salleron (1905-1992), docteur en économie et professeur d'économie politique à l'Institut catholique de Paris de 1937 à 1957. Contempteur du libéralisme et du socialisme, il est en France, avant-guerre et sous Vichy, l'un des principaux théoriciens du corporatisme. Cofondateur en 1954 du Centre d'études politiques et civiques (CEPEC), il défend tout à la fois, contre le libéralisme, l'autorité de l'Etat dans ses compétences régaliennes, et, contre l'étatisme socialiste, les libertés économiques. Catholique et royaliste militant, il collabora entre autres, aux revues Carrefour, La Nation française et Itinéraires.
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Puisque les trappistes sont, ces temps-ci, à la mode, on peut aussi parler des bénédictins… Il sont plus transgressifs que tous les punks à chien ou antifas à cheveux bleus, plus écolos que tout EELV réuni. Les mots de leur monde – effort, sacrifice, obéissance, fidélité, règle, prière, éternité, humilité – sont étrangers au nôtre. Leur choix semble dingue ou masochiste. « Bienheureux les fêlés, car ils laisseront passer la lumière »… aucune béatitude ne pourrait mieux leur convenir que celle-ci, qui n’est pas de Mathieu mais de Michel (Audiard). Ce sont les moines de Fontgombault, dont Nicolas Diat décrit la vie dans un livre intitulé Le Grand Bonheur.
On rentre dans ce livre comme on part faire une retraite. On tourne autour longtemps, un peu tenté, un peu rebuté, on est sûr de n’y trouver ni bluette, ni action trépidante… et, surtout, on a toujours une lecture plus pressée : combien d’essais en attente sur le chevet traitant de la crise sanitaire, des prochaines élections… sorti en octobre, il avait échoué en bas de la pile. Et puis la tour de Pise s’est effondrée, et la couverture, éclatante – des lettres jaunes sur une photo en noir et blanc, un moine paysan soignant ses bêtes qui pourrait aussi bien avoir été immortalisé hier qu’il y a 80 ans -,a rappelé à l’ordre : quand il faut y aller…
Quiconque a été une fois à Fontgombault salue le talent de Nicolas Diat : il y a du Cézanne, dans cet homme-là, il (dé)peint un tableau vivant, grouillant de silhouettes – alertes ou courbées, vaquant à leurs offices ou leurs travaux – et pourtant figées pour l’éternité : « Mais qui sont ces moines qui font descendre quelques gouttes du Ciel sur notre terre » ?
Nicolas Diat esquisse, par touches floues, le portrait de tel ou tel – l’anachorète, l’officier de marine, celui qui fut fiancé… – mais ne s’y attarde pas. Par pudeur, parce que l’autocentrisme n’est pas le genre de la maison ou parce que tenter de bricoler une typologie de ceux qui ont tout misé dans le pari de Pascal serait vain. Pour l’auteur, qui cite sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, « les âmes sont plus différentes que les visages » ; « chaque vocation est singulière ».
La première des obéissances est celle de ces hommes à la nature. Ou, plutôt, ils la domptent, mais en la respectant. À Fontgombault, les saisons sont reines : sous la plume de Nicolas Diat, la Fête-Dieu est ensoleillée et fleurie, le carême – et justement, il commence ces jours-ci… – terrible dans la Glaciale, comme est surnommée l’abbatiale. Il y fait si froid qu’on attend de retourner à l’extérieur comme on espère un radiateur : « Je vous laisse avec joie votre frigidaire roman », dixit, lapidaire, un religieux espagnol en partant. Le monastère est comme la misère. Moins pénible au soleil.
Mais cette acceptation est un luxe. Les moines ont peu de choses dans leur assiette, sur leur dos ou aux pieds, mais tout y est beau, bon, de qualité, durable, véritable… les légumes de la soupe comme le cuir des chaussures. Tout ce dont l’abondance de biens nous a privés.
Si ce confinement volontaire les tient à l’abri des bruits du monde, ils vivent à l’unisson des catholiques, portant la même croix. Nicolas Diat évoque la visite de Joseph Ratzinger, alors « seulement » cardinal. Il s’était ouvert du thème central de son livre L’Esprit de la liturgie – « le catholicisme a perdu la notion véritable du sacrifice » -, évoquant « le lien intrinsèque entre la crise de la foi, la crise de l’Église et la crise de la liturgie ». C’est cette brèche béante que Jean-Marie Guénois, du Figaro, a souligné au moment des manifs pour la messe… fustigé par certains clercs comme celui qui, dans une famille, révèle au grand jour les dissensions larvées.
La phrase d’accroche de ce texte n’était qu’une boutade. Ou pas. Il était d’usage, il y a quelques années, d’appeler les islamistes « fous de Dieu ». On sent, en refermant ce livre, que tant qu’il restera à Fontgombault ces autres fous de Dieu, les premiers, qu’ils soient de Trappes ou d’ailleurs, ne sauraient tout à fait avoir gagné.
Jean Graton s'en est allé jeudi 21 janvier 2021. Il avait 97 ans et s'il ne dessinait plus depuis une quinzaine d’années, il restait attentif au devenir de ses personnages et avait validé les nouvelles aventures de Michel Vaillant. Tintin.com vous propose de relire une interview inédite de Jean Graton réalisée en 1971, alors que Michel Vaillant paraissait dans le journal Tintin.
Jean Graton, comment êtes-vous devenu dessinateur de bandes dessinées ?
Assez tard, et un peu par hasard. Je ne me destinais pas du tout à la bande dessinée : je faisais de la publicité. A 23 ans, je suis venu de France pour m'installer en Belgique, et voulant obtenir de nouveaux clients publicitaires, je me suis présenté à la World Presse. Là, j'ai été reçu par Jean-Michel Charlier qui m'a conseillé, au vu de mes dessins publicitaires, de me diriger vers la bande dessinée. J'ai suivi son avis et ai donc commencé à travailler chez Spirou. Cela a constitué en somme mes débuts en bande dessinée; et un an et demi après je passais chez Tintin.
L'Église de Hongrie, dont l'histoire se confond avec celle de son peuple, a connu avec le communisme le défi le plus grave de son existence millénaire. Beaucoup ont même cru qu'elle ne s'en relèverait pas. Ce livre de témoignages fait connaître ces martyrs et confesseurs de la foi et les épreuves de cette Église passée "comme à travers le feu" (1 Co. 3, 15) de la persécution et de la "normalisation".
Près d´un demi-siècle de persécutions endurées par une population héroïque illuminée par l´exemplaire figure du cardinal Mindszenty.
Georges Bernanos. Un prophète pour notre temps, de Mg Patrick Chauvet, Presses de la Renaissance, 220 p., 15 €
Une recension de Dominique Greiner, la-croix.com
Ce livre donne des clés de lecture de trois œuvres de l’écrivain catholique. L’espérance qui y occupe une place de choix peut nous aider à vivre les temps présents.
Depuis l’incendie de Notre-Dame de Paris, Mgr Patrick Chauvet est un « recteur sans cathédrale », même si celle-ci continue de l’occuper beaucoup. Outre le suivi des travaux de restauration, Notre-Dame a besoin qu’on la fasse vivre. Mais toute cette activité ne suffit pas à faire taire une question qu’un homme de foi ne peut manquer de porter en permanence : « Pourquoi, Seigneur ? » Et c’est en relisant Bernanos auquel il avait déjà consacré de nombreuses conférences, qu’il a trouvé un consolant « chemin spirituel empli d’espérance ».
La liberté de la personne
Ce n’est donc pas une biographie que propose l’ancien professeur de lettres, mais une lecture spirituelle des œuvres prophétiques de Bernanos. Car si l’écrivain catholique appartient à une autre époque, il a encore quelque chose à nous dire « au moment où nous vivons une fin de civilisation et où nous sommes en train de vivre une révolution numérique. Il est là pour nous donner des critères qui me semblent encore bien d’actualité », estime Mgr Chauvet. En témoigne La France contre les robots, un cri d’alarme lancé contre la civilisation des machines publié en 1944.
« L’idée centrale de notre écrivain, c’est que la liberté de la personne, base de toute vraie civilisation et de toute religion authentique, court un vrai danger à son époque », commente l’auteur. « Bernanos est le laïc chrétien qui répond aux sollicitations de son époque, tout en regardant l’éternité. Il a des choses de ce monde une vue profonde ; il dénonce les conséquences lointaines d’une évolution dont il est trop aisé de s’enchanter lorsqu’on ne considère que le devant de la scène. »
Sainteté
Le regard de Bernanos sur le monde est indissociable de sa foi, de sa passion pour la vérité, de son souci pour la liberté de l’homme, de son amour de l’Église, de son aspiration au surnaturel, de son attachement aux sacrements sans lesquels il n’y a pas de sainteté possible, de la conscience de ses propres insuffisances aussi.
C’est partir de ces différentes clés que Mgr Chauvet propose d’entrer dans trois textes de Bernanos : le Journal d’un curé de campagne, Sous le soleil de Satan, les Dialogues des carmélites – « le testament spirituel de notre romancier ». Dans un style simple et assez libre, il donne accès à des œuvres dont le genre littéraire peut désarçonner le lecteur d’aujourd’hui, mais qui témoignent de la force de l’espérance dans la confrontation à l’angoisse et aux grandes épreuves de la vie. Une espérance dont notre temps a grand besoin.
Une lecture stimulante que cet essai paru il y a quelques semaines : revenant sur la stratégie déployée par les gouvernements occidentaux face à l’épidémie de coronavirus, les auteurs nous invitent à prendre du recul par une mise en perspective des données et à se détacher de la litanie hypnotique, quotidienne et macabre de Jérôme Salomon. Et, ainsi, analyser le déroulement et les conséquences prévisibles de ce grand chambardement qu’est l’épidémie mondiale du Covid-19.
Loin de nier la réalité de cette maladie, il convient, disent-ils de lui redonner sa juste place : celle d’un virus inconnu dont le taux de létalité est de 0,05 %, dont la moyenne d’âge de ceux qui en sont morts est de 81 ans (soit la moyenne de l’espérance de vie française) et qu’il faut donc traiter comme un problème de santé publique, et non comme « une sorte de monstre réveillant nos peurs les plus profondes ». Faute de quoi, on fait de ce virus « un terroriste, c’est-à-dire un agent dont l’impact psychologique et sociétal dépasse de loin son impact physique » préviennent-ils, reprenant à leur compte les mots d’un médecin réanimateur de Toulouse.
En comparaison, rappellent-ils, la mortalité d’un virus comme Ebola est de 60 %. Neuf millions de personnes, dont la moitié d’enfants, meurent chaque année de la faim dans le monde, neuf millions du cancer, trois millions de bronco-pneumopathies diverses…
Le confinement ? L’application d’un remède archaïque, alors qu’il aurait fallu appliquer la méthode, bien connue des infectiologues, de diagnostiquer (ah, ces fameux tests qui nous ont tant fait défaut, au printemps dernier !), isoler et soigner. Et pour soigner, il n’aurait pas fallu ôter à la médecine de ville la liberté de prescrire, pas plus qu’il n’aurait fallu interdire l’usage de la chloroquine sur la foi d’une étude bidonnée du Lancet.
Un remède pire que le mal dont le but, bien plus que de contenir la maladie, fut de masquer et gérer, tant bien que mal, le risque d’engorgement des hôpitaux. Écrit avant la deuxième vague, il n’y a malheureusement rien à retirer à ce constat…
Le confinement, un remède pire que le mal ? Il a eu, en effet, des conséquences que l’on commence tout juste à identifier : croissance exponentielle de graves troubles psychiques au sein de la population, crise économique à venir. Or, les crises économiques s’accompagnent toujours d’une baisse de l’espérance de vie. Ce confinement a aussi révélé la faiblesse morale, la détresse métaphysique d’un Occident qui a permis que, dans les EHPAD, les personnes âgées meurent seules, en silence, signant par leur disparition l’effacement de nos repères anthropologiques, de notre humanité, et l’avènement d’une barbarie nouvelle.
Au nom du principe de précaution.
Comment a-t-on pu prendre cette voie ? Les auteurs analysent tous les ressorts de la peur, « plus contagieuse que le virus ». C’est, disent-ils, la psychose qui a entraîné ce vent de panique : les gouvernants, et les nôtres en premier, quittant le domaine de la rationalité pour celui de l’émotion et, donc, de la surréaction, ont pris presque systématiquement les plus mauvaises décisions. Le bon sens était alors l’option la moins partagée du monde : « En raison de la mondialisation, des médias de masse, de la révolution numérique et des réseaux sociaux, c’est la première fois qu’une psychose s’est répandue dans l’Histoire. En 2020, nous avons assisté à une mondialisation de la psychose. »
Une fois enclenché le mécanisme de la peur, dans lequel les médias ont joué le rôle d’accélérateur de combustion, le monde entier s’est mis à dérailler, par une sorte d’étrange mimétisme, tant il est vrai, disent les auteurs, que « face à l’inconnu, l’Homme a tendance à régler son comportement sur celui des autres ».
Dès lors, dans une dernière tentative prométhéenne de maîtriser la mort, « un véritable totalitarisme sanitaire se met en place ».
" 70 ans après le décès de Georges Bernanos (*), l'œuvre de ce dernier est désormais accessible à tous, grâce au domaine public et au travail de bénévoles passionnés. Des classiques comme Le Journal d'un curé de campagne ou Sous le soleil de Satan pourront être lus au format numérique, après téléchargement sur un téléphone, une tablette ou une liseuse ."
JACQUES TERPANT ET JEAN RASPAIL : LES DEUX CAVALIERS
Les éditions Delcourt publient dans une version intégrale le Royaume de Borée, merveilleuse rencontre entre l'univers fantastico-mélancolique de l'écrivain Jean Raspail et les traits automnaux du dessinateur Jacques Terpant.
C’est la rencontre de deux mélancolies. Celle des couleurs automnales du dessinateur Jacques Terpant avec celle des mondes bleus perdus de Jean Raspail. Le croisement de deux maîtres de l’onirisme, inventeurs d’espaces gigantesques par la plume : ou trempée dans la gouache, ou trempée dans l’encre. Des maîtres qui nous libèrent de ce corset infernal qu’on appelle la vie et qui n’est en réalité que sa singerie, les villes modernes, leur grisaille, leur enfermement, leur limite. Car le vrai conservateur est le seul aventurier, de la meilleure aventure, la gratuite, la libre, la noble, qui s’ouvre des horizons inconnus seulement parce qu’ils sont déjà contenus dans son intérieur.
Donc, d’abord, « sept cavaliers quittèrent la ville au crépuscule par la porte de l’ouest qui n’était plus gardée » et aussitôt la chevalerie renaquit : de ces hommes pleins de sens du devoir, absurdes paladins comme aurait dit Aragon, que Jean Raspail a fait héros déserteurs et quêteurs de confins, Jacques Terpant, merveilleux bédéiste, tire des images sans égales, qui font rêver les enfants et tous ceux qui ont décidé de le rester ou que la fatalité a fait rester tels : bref, tous ceux qui ont envie de mourir pour rien sinon la conservation d’un monde d’avant que l’époque abolit.