(…) le Bien commun n’est pas l’addition des biens particuliers, comme le stipule une conception individualiste de la vie sociale ; mais il est le Bien que tous peuvent rechercher en commun, car il garantit la dignité de toute personne humaine, sans exception, à commencer par la plus faible et la plus fragile, et s’appuie sur le caractère profondément social et solidaire de la nature humaine qui fonde l’amitié sociale et la fraternité entre tous.
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De ce point de vue, l’Eglise ne saurait rester neutre par rapport aux bilans et aux programmes de ceux qui se présentent aux suffrages de leurs concitoyens. Aucune naïveté ne peut être de mise : on ne juge pas sur des discours mais sur des actes.
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Il sera donc nécessaire en particulier d’interroger le bilan du dernier quinquennat et d’en faire un repère pour évaluer les programmes et apprécier la capacité des candidats à promouvoir la dignité de la personne humaine, voire à en atténuer les atteintes déjà inscrites dans la loi et les mentalités. Un tel bilan (…) se situera volontairement du point de vue des principes non négociables. Comment le respect inconditionnel de la vie humaine a-t-il été défendu ? Qu’on pense aux lois de bioéthique, avec la PMA sans père, la fabrication d’embryons chimériques, la désorganisation institutionnalisée de la filiation ; à l’allongement du délai de l’accès à l’avortement, sans préconiser aucune mesure pour aider les femmes enceintes en difficulté à garder leur enfant, ou à la volonté d’inscrire dans la charte de l’union européenne un « droit fondamental à l’avortement », considéré comme prioritaire par la Présidence française de l’Europe, ou bien encore à la revendication de la GPA ou de l’euthanasie. Comment l’idéologie du gender et la propagande LGBT s’invitent de manière croissante dans les programmes de l’Education nationale, en organisant la déconstruction de l’homme créé à l’image de Dieu, « homme et femme ».
Sans oublier bien d’autres aspects – gestion de la « crise » sanitaire, en rapport avec la liberté de conscience, et ses conséquences sociales et économiques ; montée du terrorisme islamiste et de la violence, fractures sociales en hausse et précarisation, écologie intégrale, conception de la laïcité et liberté de culte, place de la France dans l’Europe et le monde, immigration et aide au développement … –, un catholique ne saurait faire abstraction de ces questions sociétales dans son discernement et dans son choix.
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Mgr AILLET, évêque de Bayonne. Texte complet sur le site Diocèse 64
Le 15 avril 2019, la cathédrale Notre Dame de Paris prit feu. Ce drame suscita beaucoup de dévouements, d’émotions et de prières. Le réalisateur Jean-Jacques Annaud a réussi, dans son film sorti le 16 mars dernier, à reconstituer minutieusement cet événement avec un supplément d’âme apporté par l’héroïsme des pompiers. A l’époque, de nombreux journalistes ou écrivains réagirent face à ce désastre. Ce fut le cas de Sylvain Tesson, écrivain et voyageur, dans le texte ci-dessous .
L'effroi, c'est l'impensable mêlé au sublime. Les images du brasier sont belles. Beauté horrifique, gravure en fusion de Gustave Doré.
Tout homme a un rendez-vous quotidien avec le paysage qu'il habite. Je vis sur les quais de la Seine, entre l'église Saint Julien-le-Pauvre, où fut enterrée ma mère, et l'église Saint-Séverin, où fut baptisé Huysmans. Notre-Dame est là, tout près, reine mère de sa couvée d'églises. (…)
Tous les matins, de chez moi, je regardais la flèche décochée vers le ciel par Viollet-le-Duc. Je lui adressais un coup d'œil. C'était un salut. Certaines choses sont plantées. Non! tout ne varie pas sur cette Terre et tout n'est pas destiné à circuler frénétiquement à sa surface. Le monde tourne, la croix demeure, c'est la devise des pères chartreux. C'est une belle phrase. Il faut des radeaux quand les eaux montent.
La flèche apparaissait le soir dans le ciel d'Ile-de France aux nuances pastel. Quand je venais de l'est, je la voyais surnager de l'entrelacs d'arcs absidiaux. Et sa droiture «irréprochable» (Péguy) rassurait. Elle était là. Le monde pouvait trembler, les institutions se détricoter, les bêtes disparaître. Au moins les flèches se fichaient-elles imperturbablement à la croisée des transepts. On se disait que Péguy avait raison: la flèche ne peut «faillir».(…)
Léon Bloy disait dans son journal « Dieu se retire». Il y a de cela dans l'image de l'incendie. Peut-être l'époque ne méritait-elle pas cette flèche. Elle ne s'est pas effondrée. Elle s'est soustraite au carnaval.(…).
Après tout, une cathédrale est une châsse magique, élevée à l'Invisible. (…). Le miracle des cathédrales réside dans la poussée des forces par un système de compression des façades. Arcs-boutants, contreforts et pilastres empêchent l'accrétion. Sans eux, le fruit s'ouvrirait. Les flèches jaillissent en geyser, résultant de cette contention. Elles sont la résolution de l'équation de poussée. Péguy donnait dans ses poèmes une indication technique très valable: pour lui, la flèche s'élevait «d'un seul jaillissement». La flèche est un derrick. Au-dessous, la nappe d'hydrocarbures en dormance s'appelle la foi.
Je suis monté cent cinquante fois sur Notre-Dame, nuitamment, sans abîmer le moindre ornement, sans désagréger ni arceau ni moulure, prenant soin de ne laisser aucune trace. (…) Nous allions sur les tours, sur les coursives, en haut de la flèche. Paris se révélait, à nos pieds, illuminé par tout, endormi pour partie, faisant la fête ailleurs. (…) Quand il y avait du vent, le sommet de la flèche bougeait légèrement, car elle était de bois, souple, vivante, et ce mouvement était un peu vertigineux. Nous avions l'impression de nous tenir au mât. Il portait la nuit en drapeau. Parfois, je me croyais accroché à un métronome. La très légère oscillation battait la mesure du temps passé.
Nous redescendions à la corde, nous faisions des courtes pauses sous les arcs boutants et, au milieu de ce peuple de tarasques, de gargouilles et de créatures mêlé aux feuillages gothiques, nous nous demandions ce qu'un Parisien du XIIIe siècle pensait de ce vaisseau de pierre, surnageant plus haut que tout autre édifice. Sans doute devait-il trouver le monument accordé à son époque. La nôtre jamais n'élèvera un monument pour l'âme. Tout juste peut-elle convoquer ses techniciens pour s'occuper des décombres,
Je suis un mauvais chrétien, mais je suis chrétien. Je fus éduqué dans l'amour du Christ, j'ai conservé une vénération pour la chrétienté, mais contracté un scepticisme à l'encontre du christianisme, cette canalisation de la source évangélique. Pourtant, mes escalades étaient une prière. Dans les escarpements de Notre-Dame, habillés de vide et bordés par la nuit, je n'étais jamais seul.
En gagnant la base de la flèche, nous passions sous les statues des apôtres, le rétablissement était périlleux, mais le visage de Viollet-le-Duc, qui s'était fort modestement représenté en apôtre avec sa règle d'architecte à la main et regardait sa flèche dans un déhanchement bizarre, nous rassurait un peu: il y avait d'autres hommes avec nous pour escalader la nuit. (…)
Puis le glas a sonné dans Paris. Je l'entendis de chez moi. C’était après l'attentat de Charlie Hebdo, en janvier 2015, On se rendit compte que Dieu n'est pas rancunier. C'est le miracle chrétien (et c'est un miracle exclusivement chrétien). Un Ravachol sera toujours un enfant de Dieu et recevra les prières de ceux-là mêmes dont il se moquait. Ailleurs, sous la recommandation d'autres textes, on l’égorgerait. Chacun fait ce qu'il peut avec la grandeur.
Je m'étais fracturé le crâne et le dos en tombant d'un toit. Pour ma rééducation, les médecins m'avaient recommandé de faire de l'exercice. Fidèle, je retournais à Notre Dame. Cette fois par des chemins raisonnables, déjà tracés: les escaliers des tours. (…) En arrivant au sommet des tours, je sortais du boyau de l'escalier et le jour explosait. Paris était là, gris, bleu, veiné d'artères, bruissant, bourdonnant. Une ville est un tapis dont la cathédrale est la prière. (…) La cathédrale, elle, assurait sa garde, imperturbable. Mais pas infaillible.
Que signifie l'effondrement? (…) Et si l'effondrement de la flèche était la suite logique de ce que nous faisons subir à l'Histoire? L'oubli, le ricanement, la certitude de nous-mêmes, l'emballement, l'hubris, le fétichisme de l'avenir… et, un jour, les cendres. Peut-être un peuple va-t-il se porter au chevet de sa reine? Peut-être va-t-il se souvenir qu'il n'est pas né hier.
Extraits de l’article publié dans Le Point le 18 avril 2019.
« Macron » ? C'est un défi pour l'intelligence politique des Français, une énigme et une question laissée sans réponse ! Comment expliquer qu'un homme seul, sans expérience et sans parti, ait pu en quelques mois à peine prendre la tête de la France, cinquième puissance au monde dotée du « feu nucléaire », et pulvériser le système de clivage politique séculaire né le 11 septembre 1789 ? Vrai ou fausse « Révolution démocratique » ? Arnaud-Aaron Upinsky relate l'aventure scientifico-policière la plus exaltante qu'il a dû mener durant l'été 2017 pour venir à bout de l'énigme. À partir du seul mot, « Ventriloque », d'un adverbe « En même temps » et d'une phrase « La politique c'est un style, c'est une magie », il découvrira au fil de l'enquête ce que nul politologue n'avait même soupçonné, la clef du triple angle mort d'aveuglement des Français : 1. Le secret bien gardé de l'élection de Macron aux Présidentielles 2017 ; 2. Le mystère du « plafond de verre » ; 3. L'énigme du « Mal français ». Pour conduire les Français jusqu'aux limites de l'impensable - la Révélation d'une vision radicalement nouvelle de la science politique et d'une grille de lecture à la fois linguistique, musicologique et magique de l'art du gouvernement - il retrouve les accents pamphlétaire de Démosthène exhortant les Athéniens à sortir de leur aveuglement pour vaincre Philippe de Macédoine ! Les Présidentielles 2017, c'est une Révolution ! De même, il y aura un avant et un après le « Macron » d'Upinsky qui à l'inverse du « déclinisme » ambiant, livre le « secret » de la « Renaissance de la France », en montrant comment Macron est « en même temps » le problème et la solution à tous leurs maux. « Macron le Président Ventriloque » est à la fois un Pamphlet, le premier Traité de Magie politique et un Manifeste aux « aveugles du langage » pour triompher aux Présidentielles 2022 ! Fil d'Ariane pour triompher du « Mal français », il est le livre événement que tous les Français attendaient !
«La bataille pour la liberté de l'instruction en famille ne fait que commencer»
Publié le 4/2/22.Par Jean-Baptiste Maillard
FIGAROVOX/TRIBUNE - L'article 49 de la loi Principes républicains, qui durcit les conditions de dispense de l'école à la maison, doit paraître début février. Au nom de la liberté d'instruction, Jean-Baptiste Maillard demande au gouvernement de renoncer à cette mesure.
Jean-Baptiste Maillard est secrétaire général de «Liberté éducation», une association de défense des parents qui ont choisi l'instruction à domicile pour leurs enfants. Il publie L'école à la maison: une liberté fondamentale (éd. Artège, 2021).
À première vue, l'école à la maison ne concerne qu'un petit nombre d'enfants : 62.000 l'année dernière. Et pourtant, il s'agit d'une liberté fondamentale dont tous les parents peuvent avoir besoin un jour, comme nous l'avons vu pendant le premier confinement. L'école à la maison, qu'on appelle aussi instruction en famille («IEF»), fut alors imposée à tous. Les familles n'y étaient certes pas préparées, les parents contraints de jongler entre le télétravail et l'investissement chronophage que mérite cette instruction. Si nombre d'entre elles vécurent mal ce choix «subi» que d'autres ont mis souvent plusieurs années à mûrir, beaucoup cependant goûtèrent avec bonheur à cette première expérience et eurent même envie de la poursuivre. Ainsi, dans les pays où l'école à la maison se développe, elle aurait augmenté de 30 à 40 % depuis 2019.
Le 2 octobre 2020, le Président de la République a pris une décision «radicale», selon ses propres mots : restreindre drastiquement cette liberté fondamentale aux seuls impératifs de santé, c'est-à-dire aux enfants ne pouvant pas du tout aller à l'école en raison d'un lourd handicap. C'était sans compter sur la mobilisation des familles, qui reçurent des soutiens sur tous les bancs de l'Assemblée, y compris au sein du parti présidentiel. Pour les familles déjà en instruction en famille, nous gagnâmes deux années de dérogation supplémentaires, ce qui fut loin de nous satisfaire. La loi fut votée manu militari et promulguée en août 2021. Le Conseil constitutionnel émit cependant une réserve d'interprétation concernant l'intérêt supérieur de l'enfant. Mais on apprend aujourd'hui que le prétendu séparatisme de ces familles n'était en réalité qu'un prétexte du gouvernement.
Aujourd’hui, Radio Notre-Dame a mis en ligne des hommages à Victor Loupan qui y animait plusieurs émissions. Une biographie est proposée sur cette page. Louis Daufresne, rédacteur en chef à Radio Notre-Dame, animateur de l’émission “Le Grand débat”, lui rend hommage ici. Toujours sur Radio Notre-Dame, une émission spéciale “Culture Club” lui était consacrée également aujourd’hui. Enfin, l’émission “Lumière de l’orthodoxie” diffusée hier est en ligne ici.
Les obsèques de Victor Loupan auront lieu jeudi 27 janvier à partir de 14h30 dans la cathédrale Saint-Alexandre-Nevsky à Paris (12, rue Daru, 8e).
La Fête de Saint-Nicolas, vers 1660, Jean Steen (Amsterdam, Rijksmuseum). Dans ce tableau, Jan Steen raconte ce qui se passe et évoque les diverses émotions suscitées par cette fête. La petite fille serre fermement dans ses bras sa nouvelle poupée à l’image de saint Jean-Baptiste qu’elle vient de recevoir – selon la croyance populaire, saint Jean protége les enfants de la maladie -. Un seau rempli de bonbons et de jouets pend à son bras. Manifestement, elle n’est pas prête à s’en séparer… Grand frère pleure. Derrière lui, la servante montre ce qu’il a reçu : une chaussure d’où sortent des petites banches mortes. Son frère cadet, qui lui, a bien reçu un cadeau, le montre du doigt en se moquant de lui. Mais peut-être la grand mère, qui fait un signe à l’arrière plan, apportera-t-elle un peu de consolation : y aurait-il quelque chose de caché derrière le rideau ?
La fête de Saint-Nicolas (6 décembre) est une importante fête familiale. La veille, le saint généreux descend par la cheminée et dépose des petits cadeaux et des friandises aux enfants sages. Ceux qui espèrent recevoir quelque chose y déposent un soulier. À l’époque de Steen, cette fête « catholique » fut abolie par l’Église réformée, qui rejetait le culte des saints. Ainsi, dans bon nombre de villes, il était interdit de cuire des biscuits à l’image du saint homme. Steen étant lui-même catholique.
Évangile de Jésus-Christ selon saint Jean 18,33b-37.
En ce temps-là, Pilate appela Jésus et lui dit : « Es-tu le roi des Juifs ? »
Jésus lui demanda : « Dis-tu cela de toi-même, ou bien d’autres te l’ont dit à mon sujet ? »
Pilate répondit : « Est-ce que je suis juif, moi ? Ta nation et les grands prêtres t’ont livré à moi : qu’as-tu donc fait ? »
Jésus déclara : « Ma royauté n’est pas de ce monde ; si ma royauté était de ce monde, j’aurais des gardes qui se seraient battus pour que je ne sois pas livré aux Juifs. En fait, ma royauté n’est pas d’ici. »
Pilate lui dit : « Alors, tu es roi ? » Jésus répondit : « C’est toi-même qui dis que je suis roi. Moi, je suis né, je suis venu dans le monde pour ceci : rendre témoignage à la vérité. Quiconque appartient à la vérité écoute ma voix. »
Hasard du calendrier ? Main du destin ou de la providence ? En tout cas, c’est un fait : l’armistice fut signé le 11 novembre, jour de la Saint-Martin.
Le maréchal Ferdinand Foch, polytechnicien, artilleur – ce qu’on appelait, alors, une arme savante -, était un « grand cartésien » qui « avait foi dans la raison humaine », comme l’écrivit André Tardieu (1876-1945), son collaborateur pendant la guerre et futur président du Conseil. Raymond Recouly (1876-1950), un autre de ses biographes d’avant-guerre, rapportait les propos de Foch au sujet d’un homme politique que l’on disait appelé à un bel avenir : « C’est un sceptique. Il ne croit à rien. Ainsi, n’arrivera-t-il à rien. » Foch était donc aussi un homme de foi : « Une foi de simple, de charbonnier » qui lui donnait « une assiette fixe, inébranlable, pour y bâtir et y organiser son existence toute entière », poursuivait Recouly. Toujours dans son Mémorial de Foch, Recouly raconte que le maréchal évoquait souvent ce légionnaire romain prévoyant qui emportait toujours avec lui un pieu pour étayer sa tente lorsqu’il arrivait le soir à l’étape. Foi et raison.
Quand j’ai su que vous prépariez un livre avec Christophe Barbier, j’ai souhaité le lire car la caution politique de votre tandem laissait croire que vous vous apprêtiez à faire une proposition politique et, venant de la société civile, celle-ci m’intéressait.
On sait que Christophe Barbier est un journaliste engagé dans le Camp du Bien, pour utiliser l’expression de Philippe Muray. L’ouvrage qu’il signe avec vous s’inscrit dans cette ligne.
Pourquoi dès lors dire régulièrement que ça n’est pas le cas?
Vous écrivez en effet: «Je ne roule pour aucun camp» page 242, «je n’ai pas de camp, je suis un arbitre objectif» page 257, «je n’ai pas de camp, je ne roule pour personne» page 288, «je n’ai pas de camp, mais je vais mener campagne contre un ennemi: l’abstention» page 289.
Vous dites également: «TPMP est ouvert à tout le monde, sauf aux cons» (page 195). Pardonnez-moi, je n’ai pas vu toutes vos émissions, loin de là, mais des «cons» comme vous dites, j’ai cru comprendre qu’il y en eut plus d’un sur vos plateaux! Je ne vous le reproche pas, je pointe juste une contre-vérité. J’aurais aimé un peu plus de précisions sur ces cons-là, une petite théorie du con en quelque sorte.
Si vous permettez, à défaut, je m’y mets:
C’est assez facile, car votre con est portraituré en creux à toutes les pages. Il suffit de voir pour quoi et qui vous roulez, on imagine bien que ceux qui ne caracolent pas dans la même direction sont les cons. Le con c’est hélas souvent celui qui ne pense pas comme nous. Vieille comme les hommes, la notion se trouve bien vite circonscrite.
Quelle est votre pensée ? C’est peu ou prou celle de Christophe Barbier qui s’active pour le camp du bien, c’est-à-dire pour les gentils, les anti-cons par excellence…
Ces gentils veulent laisser une seconde chance aux prisonniers moins coupables de leurs délits que victimes de la société. Ceux qui ne se trouvent pas dans la situation d’avoir une seconde chance parce qu’une première ne leur a jamais été offerte me paraissent les oubliés de notre société. Or vous dites œuvrer pour eux. Mais vous semblez surtout aimer les victimes quand elles ont d’abord été coupables plutôt que quand elles n’ont jamais fait payer à autrui une dette qui n’est pas la leur. Vous qui dites avoir été radicalement changé par les gilets jaunes, «une révolution française» écrivez-vous page 27, vous devriez comprendre que la seconde chance peut ne pas être une priorité quand tout s’effondre y compris pour ceux qui attendent gentiment une chance qui probablement ne viendra pas si l’on continue, comme vous, à ranger dans le camp des cons ceux que vous nommez: Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen page 142, Nicolas Dupont-Aignan et Florian Philippot page 170. Dès lors, on comprend où vous vous situez: aux côtés de Macron & Hidalgo, Bertrand, Jadot & Pécresse qui sont des clones de Mitterrand & Chirac, Sarkozy & Hollande, les responsables d’une société que vous dites pourtant vouloir changer.
Ces gentils parlent de «violences policières» et prennent parti pour George Floyd page 117, pour la famille Traoré page 118, pour Michel Zecler page120 devenu «Michel» page 122, pour Cédric Chouviat page 115 devenu «Cédric» page 116 et pour tous ces gens dont vous dites qu’ils sont des victimes n’ayant «rien fait», page 118, ce qui laisse croire que la police interpelle pour le plaisir et tue en fonction des couleurs de peau - c’est une opinion, elle est défendue par ceux qui, à gauche, s’avèrent sensibles aux sirènes décolonialistes matinées d’islamo-gauchisme.
Ces gentils qui savent être méchants défendent en principe le débat contradictoire et se targuent d’inviter quiconque ne pense pas comme eux. Ainsi, en contrepoint du discours de Michel Zecler, vous avez convié «un policier du syndicat minoritaire France Police», page 127, qui a démonté la version de la victime en commentant la vidéo intégrale avec arrêts sur images et sur lignages pour valider sa thèse. Il la défend, vous précisez page 127: «je le recadre sèchement, mais au moins il ne pourra pas dire qu’un tel point de vue n’a pas droit au chapitre». Autrement dit: si l’on accepte de se faire tancer, on a le droit de parler sur votre plateau.
Les primaires écologistes ont démarré le 16 septembre. On n’entend pas ces écologistes -qui se veulent modernes- alerter sur l’énorme pollution que crée l’univers numérique dans lequel nous vivons. C’est ce que révèle le journaliste Guillaume Pitron dans son livre L’Enfer numérique - Voyage au bout d’un like qui vient de paraître aux Éditions Les Liens qui Libèrent. Il y montre le coût environnemental exorbitant de la révolution numérique, pourtant présentée comme écologique, et les ambivalences de la jeune « génération climat » qui se veut grande protectrice de l’environnement.
Que se passe-t-il lorsque vous envoyez un e-mail ou pressez le pouce levé en l’air - le fameux like - sur un réseau social? Quelle est la géographie de ces milliards de clics, ainsi que leur impact matériel? Quels défis écologiques et géopolitiques charrient-ils à notre insu? (…)
Internet a permis aux technologies numériques de coloniser chaque recoin de notre planète. À force de transmuer la moindre action tangible en processus informatique, tout ce que nous entreprenons aujourd’hui recèle une dimension digitale. (…)
Une numérisation du monde que le Covid-19 n’a fait qu’accélérer. Cette pandémie mondiale nous a, de toute évidence, rendus encore plus tributaires des outils digitaux (…)
L’immense majorité d’entre nous se montre bien incapable d’expliquer quelles installations ont été déployées pour relier nos ordinateurs à nos tablettes ou nos smartphones. D’abord parce que les technologies numériques provoquent un malentendu. À écouter leurs hérauts, l’univers digital ne serait en effet guère plus concret qu’un «nuage», le fameux cloud dans lequel nous stockons nos documents et photos. Pour un peu, le monde digitalisé serait synonyme de «vide» ou de «néant». Il nous invite à commercer en ligne, jouer virtuellement et nous étriper sur Twitter sans que cela ne mobilise, à première vue, le moindre gramme de matière, le plus infime électron, la première goutte d’eau. Bref, le numérique est le plus souvent réputé ne générer aucun impact matériel (…)
Supposément libéré de toute contrainte physique, le capitalisme numérique peut dès lors s’épanouir à l’infini. L’industrie digitale peut même vanter (…) son tribut positif à la préservation de la planète (…) Autrement dit, nous ne «sauverons» pas la planète sans un recours massif aux technologies numériques. (…) Or, ce qui ne se perçoit pas ne se conçoit pas davantage. Pourtant les questions, cruciales, demeurent: quel est l’impact spatial de cet outil? (…)
Pour envoyer un simple like, nous déployons ce qui sera bientôt la plus vaste infrastructure jamais édifiée par l’homme. Nous avons structuré un royaume de béton, de fibre et d’acier, hyperdisponible, sommé d’obtempérer à la microseconde près. Un «inframonde», constitué de data centers, de barrages hydroélectriques, de centrales à charbon et de mines de métaux stratégiques, tous unis dans une triple quête: celle de puissance, de vitesse et… de froid. Il s’agit également d’un royaume amphibie sillonné par des navires câbliers et des supertankers, peuplé d’hommes d’affaires et de marins, de mineurs et d’informaticiens, de maçons et d’électriciens, de balayeurs et de convoyeurs de camions-citernes. (…)
La pollution digitale est colossale, et même celle qui croît le plus rapidement (…) Cette pollution est d’abord due aux milliards d’interfaces (tablettes, ordinateurs, smartphones) constituant notre porte d’entrée sur internet. Elle provient également des données que nous produisons à chaque instant: transportées, stockées, traitées dans de vastes infrastructures consommatrices de ressources et d’énergie, elles permettront de créer de nouveaux contenus digitaux pour lesquels il faudra… toujours plus d’interfaces! Aussi ces deux familles de pollution se complètent-elles et s’alimentent-elles l’une l’autre. Les chiffres sont édifiants: l’industrie numérique mondiale consomme tant d’eau, de matériaux et d’énergie que son empreinte est le triple de celle d’un pays comme la France ou l’Angleterre. Les technologies digitales mobilisent aujourd’hui 10 % de l’électricité produite dans le monde et rejetteraient près de 4 % des émissions globales de CO2, soit un peu moins du double du secteur civil aérien mondial .(…) La pollution digitale met la transition écologique en péril et sera l’un des grands défis des trente prochaines années.(…)
Aux États-Unis, un adolescent passe sept heures et vingt-deux minutes de son temps libre par jour devant un écran. En France, un adulte de 18 ans a déjà possédé en moyenne… cinq téléphones mobiles! Et plus on est jeune, plus on renouvelle souvent ses équipements, lesquels comptent pourtant pour près de la moitié de la pollution numérique.
Pour la première fois dans l’histoire, une génération entière (la génération climat) se lève pour «sauver» la planète, traîner des États en justice pour inaction climatique et replanter des arbres. Des parents soupirent d’avoir «trois Greta Thunberg à la maison», vent debout contre la consommation de viande, le plastique et les voyages en avion. Mais dans le même temps, cette progéniture est celle qui a le plus recours aux sites d’e-commerce, à la réalité virtuelle et au gaming. Les jeunes raffolent également de la vidéo en ligne pour regarder la télévision, ce qui constitue un non-sens écologique total. Une étude britannique devait confirmer que les digital natives, nés avec internet, seront les premiers à adopter, à l’avenir, les nouveaux services et interfaces proposés par les grandes entreprises du secteur numérique. (…)
La « génération climat » sera l’un des principaux acteurs du doublement, annoncé à l’horizon 2025, de la consommation d’électricité du secteur numérique (20 % de la production mondiale) ainsi que de ses rejets de gaz à effet de serre (7,5 % des émissions globales). (…)
Le numérique tel qu’il se déploie sous nos yeux ne s’est pas, dans sa très grande majorité, mis au service de la planète et du climat. (…) C’est pourquoi nous avons voulu (…) révéler l’anatomie d’une technologie qui, au nom d’un idéal quasi mystique de dématérialisation, est en train de produire une modernité prodigieusement matérialiste. Et mettre au jour cette évidence: envoyer un e-mail ou un like charrie de vertigineux défis jusqu’alors soustraits à nos sens.
(à partir des extraits du livre publiés dans Le Figaro du 14 septembre 2021)
Ce samedi 4 septembre et pour le huitième week-end consécutif, de nouvelles manifestations contre le pass sanitaire sont organisées à Paris et un peu partout en France. Beaucoup jugent la politique du gouvernement disproportionnée d’avec la situation sanitaire, et dénoncent l’avènement d’un État maternant faisant de la santé la mesure de toute chose.
Confinement, masque, passe sanitaire, vaccination quasi-obligatoire : depuis dix-huit mois, voilà ce à quoi l’État nous contraint. Pour certains, ce sont des mesures de simple bon sens pour lutter contre l’épidémie, un moindre mal qu’il faut accepter. Ne sommes-nous pas en guerre contre le virus et ne sont-ce pas les moyens les plus efficaces pour s’en protéger ? Ceux-là considèrent le plus souvent les opposants à ces règles comme des grincheux, des inconscients, des irresponsables, des obscurantistes voire comme des complotistes et même des criminels.
Puisque je suis l’un de ces opposants, je répondrais que je ne me sens ni grincheux, ni inconscient, ni irresponsable, ni obscurantiste, ni même criminel. Je trouve tout simplement ces règles disproportionnées et donc paradoxalement déraisonnables. Je dis paradoxalement puisque la majorité de nos concitoyens, semble-t-il, considère au contraire que ces règles sont justes et fondées scientifiquement. Ne voulant pas entrer dans le débat sur l’efficacité de celles-ci, je pars du postulat qu’elles ont effectivement une certaine efficacité immédiate. Mais mon opposition porte sur le caractère infantilisant de ces mesures. Je considère, de plus, que ces contraintes sanitaires sont révélatrices de l’esprit de notre époque et par-là peuvent susciter certaines prises de conscience et résolutions.
Parler de disproportion implique l’estimation d’un rapport entre deux choses. Il s’agit donc de savoir à quoi on réfère ces règles sanitaires. Il est clair que l’État actuel et avec lui la majorité des citoyens considèrent que la santé est un bien tel qu’on peut lui sacrifier des libertés fondamentales (de circulation, de culte, de convivialité, etc.). Thomas Hobbes dans Léviathan (1651) fonde la légitimité de l’État souverain sur le fait qu’il est garant de la sécurité des citoyens lui ayant abandonné le droit naturel de se défendre eux-mêmes. Le danger de la mort violente caractérisant l’état de guerre de tous contre tous est ainsi perçu comme le mal absolu relativisant tous les autres biens. L’État achète sa souveraineté en offrant à ses sujets la paix dans laquelle ils peuvent jouir de leurs biens individuels et vaquer à leurs occupations privées. Le régime mental de la modernité consiste en la neutralisation de toutes les grandeurs au nom desquelles un être humain pourrait être amené à risquer sa vie. Cette logique a été tempérée pendant plusieurs siècles par les mœurs prémodernes mais aujourd’hui elle s’exprime dans toute sa vigueur. D’autant plus, on le voit aujourd’hui, qu’à la sécurité s’est jointe la santé puisque l’État souverain est devenu entre-temps un État provident. Au nom de la santé, désormais tout est possible. L’intimidant Léviathan est devenu une matrone étouffante qui refuse de laisser les citoyens prendre leurs responsabilités et discerner en conscience.
Confinement, masque, vaccination : admettons que ces mesures soient globalement efficaces pour protéger du virus et stopper sa propagation. Que ceux qui veulent absolument se protéger se protègent. Ils ne peuvent plus dès lors accuser les autres d’être de potentiels criminels puisqu’ils sont protégés. Si quelqu’un préfère s’exposer au virus plutôt que de sacrifier des biens qu’il estime supérieurs, tel que, l’an dernier, rendre un culte à Dieu ou, aujourd’hui, aller boire un verre en terrasse avec des amis, au nom de quoi l’État pourrait-il lui interdire ? Ou encore, si quelqu’un considère que le recul sur de tels vaccins n’est pas suffisant et qu’il ne veut pas être cobaye, au nom de quoi considérer ce doute raisonnable comme l’attitude d’un arriéré ? D’aucuns vont répondre que la santé étant collectivement prise en charge, il convient de veiller à ne pas faire porter à la collectivité (en l’occurrence les hôpitaux) un poids insupportable. C’est justement là que se révèle le principe ultime de l’État maternant.
Aujourd’hui, l’État nivelle et contraint au nom d’un bien absolutisé, la santé en lieu et place du salut de l’âme
Dans la « société des individus » (Marcel Gauchet), les citoyens ont délégué à l’État le soin de prendre en charge des pans entiers de leur vie. « L’individu total » finit logiquement par générer un État total. Mais les moyens technologiques étant bien plus performants qu’au mitan du XXe siècle, cet État total n’a plus besoin d’utiliser la violence pour se faire respecter. Il n’est pas non plus aux mains d’un parti unique. Il est l’instrument docile de notre projet d’émancipation de la condition humaine. Il est plébiscité par une majorité d’individus qui se croient libres mais qui sont en faits victimes de leurs propres peurs. Le moteur de la biopolitique actuelle, héraut du transhumanisme, est le refus des limites de l’ordre humain, refus dont le bras armé est l’État et dont les cerveaux sont GAFAM et Big Pharma. Or n’est-ce pas en assumant cet ordre que l’homme peut se dépasser en s’ouvrant à plus grand que lui ? Telle est la liberté de celui qui risque parce qu’il hiérarchise les différents biens humains. Aujourd’hui, l’État nivelle et contraint au nom d’un bien absolutisé, la santé en lieu et place du salut de l’âme.
Pas de place chez nous pour Antigone, Achille ou Socrate !
La rentrée scolaire a eu lieu officiellement le 2 septembre. Les rituels ont été déroulés comme chaque année : promesses du ministre, mécontentement des syndicats, protocole sanitaire…L’Etat-nounou met tout en place pour prendre en charge au maximum nos enfants dès le plus jeune âge (école obligatoire dès 3 ans !). Et il veille à ce que rien ne lui échappe, avec notamment la quasi interdiction de l’école à la maison qui vient d’être validée par le conseil constitutionnel pour la rentrée 2022. Ce coup de projecteur médiatique sur l’école ne doit pas nous faire oublier que les parents sont les premiers éducateurs de leurs enfants. Les deux textes ci-dessous nous le montrent avec force.
Les parents sont, qu'on le veuille ou non, les premiers maîtres, les instituteurs naturels et providentiels de leurs enfants. Cette tâche éducatrice, ils sont les seuls à la commencer. Ils sont les mieux placés pour la réussir.
Quel éducateur aura, comme les parents, suivi l'enfant dès le berceau, aura le temps de faire un juste discernement des inclinations de l'esprit et des aptitudes particulières de chaque enfant ? Aura-t-il la perspicacité et l'amour d'une mère dont l'enfant est la chair de sa chair ? (...)
Les parents sont irremplaçables. Trouver l'éducateur officiel qui ait le goût, le loisir, l'aptitude qu'exige cette lente initiation de l'esprit, du cœur, de la conscience qui s'opère au foyer familial, même quand cette officine de la vie ne fournit qu'un minimum de ressources, relève de l'impossible. Ces truismes sont des vérités et on finira par y revenir car, en remplaçant les parents par des sortes de fonctionnaires, on n'a trouvé qu'un bouche-trou qui ne bouche pas le trou.
C'est rejeter une force naturelle et payer une force artificielle ; c'est arroser une plante avec une lance en tenant un parapluie pour la protéger de l'eau du ciel. Mais cela ne donnera aucun résultat, même en théorie. On ne peut toujours faire le lavage des autres ; c'est en famille qu'il faut laver son linge sale, surtout quand il s'agit de langes. Seuls les parents pourront ou voudront donner à leurs enfants assez de sollicitude et de soins. L'expression «dévouement maternel» appliquée à une femme qui voit des enfants se succéder sans trêve dans ses mains, n'est qu'une aimable métaphore.
G.K.Chesterton dans Divorce, 1920
Les parents, parce qu'ils ont donné la vie à leurs enfants, ont la très grave obligation de les élever et, à ce titre, doivent être reconnus comme leurs premiers et principaux éducateurs [11].
Le rôle éducatif des parents est d'une telle importance que, en cas de défaillance de leur part, il peut difficilement être suppléé. C'est aux parents, en effet, de créer une atmosphère familiale, animée par l'amour et le respect envers Dieu et les hommes, telle qu'elle favorise l'éducation totale, personnelle et sociale, de leurs enfants. La famille est donc la première école des vertus sociales nécessaires à toute société. Mais c'est surtout dans la famille chrétienne, riche des grâces et des exigences du sacrement de mariage, que dès leur plus jeune âge les enfants doivent, conformément à la foi reçue au baptême, apprendre à découvrir Dieu et à l'honorer ainsi qu'à aimer le prochain ; c'est là qu'ils font la première expérience de l'Église et de l'authentique vie humaine en société ; c'est par la famille qu'ils sont peu à peu introduits dans la communauté des hommes et dans le Peuple de Dieu. Que les parents mesurent donc bien l'importance d'une famille vraiment chrétienne dans la vie et le progrès du Peuple de Dieu lui-même [12].
La tâche de dispenser l'éducation qui revient en premier lieu à la famille requiert l'aide de toute la société. Outre les droits des parents et de ceux des éducateurs à qui ils confient une partie de leur tâche, des responsabilités et des droits précis reviennent à la société civile en tant qu'il lui appartient d'organiser ce qui est nécessaire au bien commun temporel. Elle a, entre autres tâches, à promouvoir l'éducation de la jeunesse de multiples manières. Elle garantit les devoirs et les droits des parents et des autres personnes qui jouent un rôle dans l'éducation ; elle leur fournit son aide dans ce but. Selon le principe de subsidiarité, en cas de défaillance des parents ou à défaut d'initiatives d'autres groupements, c'est à la société civile, compte tenu cependant des désirs des parents, d'assurer l'éducation. En outre, dans la mesure où le bien commun le demande, elle fonde ses écoles et institutions éducatives propres [13].
Concile Vatican Il, Gravissimum Educationis, n° 11 à 13
Merci à EVR pour cet éclairage.
Sur ce sujet, on peut aussi écouter la conférence de Yannick Bonnet ICI.
Les écologistes ne se préoccupent pas d’une pollution pourtant bien présente notamment dans nos villes: la pollution sonore. Le projet de loi « Climat et Résilience », en cours de discussion, ne l’aborde pas. En ces temps de vacances, où beaucoup vont pouvoir goûter au silence de la campagne, de la montagne, voici deux réflexions sur le bruit, le silence et l’ouïe.
Pendant l'été 1965, les postes françaises usaient d'une flamme philatélique qui mettait en garde toutes les enveloppes: « Le bruit menace votre santé physique et mentale. » Plus d'un demi-siècle après, le bruit ne nous menace plus: il a gagné la partie. On l'appelle "musique", (…) Selon un sondage, sept Français sur dix ne sauraient vivre sans "musique", ce qui définit précisément une addiction. On dirait aujourd'hui que c'est le silence qui menace notre santé physique et mentale... Joseph de Maistre soutenait que chaque invention d'une arme plus meurtrière était une défaite pour l'humanité: ceteris paribus, on pourrait le redire pour les techniques de diffusion du bruit. Dans Filles de la pluie, qui eut le prix Goncourt en 1912, André Savignon raconte la profanation du silence d'Ouessant par un gramophone dans un café; trente ans plus tard, habitant d'une HBM à la lisière de Paris, Denis de Rougemont évoque le supplice de la radio des voisins, quand l'été fait ouvrir les fenêtres; après-guerre avec le transistor, l'autoradio, la "sonorisation" qui transforme désormais le moindre défilé syndical en Gay Pride et enfin, depuis un lustre, les diffuseurs portatifs de vacarme qui permettent aux vélos, aux motos, aux trottinettes et aux simples piétons de répandre cette «puanteur sonore », comme aurait dit Nietzsche, la pollution acoustique a fait des progrès dévorants. En anglais, comme on sait, le bruit se dit noise, et pour une fois le franglicisme serait bienvenu — d'autant que c'est un vieux mot français qui est à lui seul un programme d'agitation et de discorde. (Philippe Barthelet, chroniqueur et écrivain dans Valeurs Actuelles du 24 juin 2021)
Il y a eu deux types de silence: celui de l'appartement vide, un silence terrible, et puis le silence habité. (…) Il s'agit de la même absence d'onde, mais, dans un cas, elle exprime notre angoisse; dans l'autre, c'est un silence qui nous oblige, nous rassemble. Car l'ouïe est ce sens capable d'une présence qui n'est pas manifeste comme elle l'est pour le toucher ou la vue. L’ouïe va recevoir ce silence, qui peut être présence des absents ou au contraire absence de toute présence. (…)
Une maison, ou bien une terrasse ou les gens discutent, par exemple, peuvent émettre des sons, oui, car c'est la vie. Mais ce ne sont pas des «bruits». Sophocle dit : « Tout est bruit pour qui a peur. » Nous vivons aujourd'hui une extension du domaine du bruit. Par exemple, ces incessants rappels à la distanciation. (…)
La première chose que nous faisons en venant au monde, c'est de crier, c'est-à-dire de nous confier à l'autre, à son ouïe, à sa capacité de se sentir obligé par notre cri. Simone Weil disait que le cri, c'est la technique la plus pauvre qui soit; c'est dire simplement «au secours». La première chose que l'on n'a pas entendue, c'est le cri des morts - et cela continue ! Or l'ouïe doit se faire d'autant plus fine qu'il s'agit d'une personne qui ne peut même plus crier pour dire «prenez soin de moi! ». Si l'humanité a commencé par la toilette des morts, c'est que l'homme était devenu capable d'entendre le cri de celui qui ne criait plus.
De la même façon, un ado qui va mal, c'est un ado qui est rongé par son cri, et il n'ira mieux que si un adulte entend ce cri silencieux. (…). Il y a (…) un appel silencieux dans le cœur des hommes et des femmes, il y a en nous un cri pour que la vie, parce qu'elle est bonne, soit donnée. Ce cri n'est plus entendu. Car la vie aujourd’hui n'est plus vue d'abord comme un beau risque à prendre. A quoi tenons-nous? À un fil, celui de la relation, et c'est ce fil que nous sommes en train de détruire avec les névroses de la peur.
La chrétienté était cette découverte incroyable d'un Dieu qui crie. Le premier geste du Dieu incarné, c'est le cri du bébé, et le dernier, c'est le cri sur la croix, le cri de l'homme qui meurt. Or, avec la crise sanitaire, nous assistons à une inversion de toutes les valeurs chrétiennes. Nous avons quitté le régime de la relation à l'autre qui était celui de la chrétienté.(…)
Ce n'est pas un hasard si nous avons deux oreilles. Lorsqu'on écoute quelqu'un, il y a une oreille qui reste près de nous, et qui écoute ce que nous comprenons de ce qu'il nous dit - avec notre prisme. L'autre oreille, elle, va se poser sur la bouche de l'autre, sans préjuger de ce qu'il va dire; elle va essayer de se laisser surprendre par l'inouï, le jamais entendu. Dans l'écoute véritable on doit donc «prêter l'oreille» - qui se dit justement au singulier. Il faut entendre même ce que l'autre ne nous a pas dit, et parfois même ce qu'il ignorait vouloir nous dire. L'ouïe, c'est le sens de la relation, de la réciprocité en soi. (…)
L’oreille est le sens du temps, et notre temps est altéré. (…). Écouter quelqu'un signifie que l'on accepte de perdre du temps, car on ne prend son temps que si on a par avance accepté de le perdre. II faut donc offrir son attention pour recevoir, c'est un cadeau. Il s'agit d'une situation où je ne peux recevoir que ce que j'ai déjà offert.(…)
Mais voilà, dans le temps de l'accélération, cette disponibilité n'existe plus. L'ouïe est l'organe du temps. Rappelons-nous ces trois mots de saint Augustin sur la prière : « Tace et clama » (« tais-toi et crie »). Faire silence pour laisser monter en soi le cri pour plus de justice, plus d'amour. Il faut écouter ce cri, sans quoi l'on est coupé de sa vie.
Martin Steffens, agrégé de philosophie, dans Le Figaro du 15 mars 2021
Ce que vos ancêtres appelaient des libertés, vous l’appelez déjà des désordres, des fantaisies. « Pas de fantaisies ! disent les gens d’affaires et les fonctionnaires également soucieux d’aller vite, le règlement est le règlement, nous n’avons pas de temps à perdre pour des originaux qui prétendent ne pas faire comme tout le monde… » Cela va vite, en effet, cher lecteur, cela va très vite. J’ai vécu à une époque où la formalité du passeport semblait abolie à jamais. N’importe quel honnête homme, pour se rendre d’Europe en Amérique, n’avait que la peine d’aller payer son passage à la Compagnie Transatlantique. Il pouvait faire le tour du monde avec une simple carte de visite dans son portefeuille. Les philosophes du xviiie siècle protestaient avec indignation contre l’impôt sur le sel — la gabelle — qui leur paraissait immoral, le sel étant un don de la Nature au genre humain. Il y a vingt ans, le petit bourgeois français refusait de laisser prendre ses empreintes digitales, formalité jusqu’alors réservée aux forçats. Oh ! oui, je sais, vous vous dites que ce sont là des bagatelles. Mais en protestant contre ces bagatelles le petit bourgeois engageait sans le savoir un héritage immense, toute une civilisation dont l’évanouissement progressif a passé presque inaperçu, parce que l’État Moderne, le Moloch Technique, en posant solidement les bases de sa future tyrannie, restait fidèle à l’ancien vocabulaire libéral, couvrait ou justifiait du vocabulaire libéral ses innombrables usurpations. Au petit bourgeois français refusant de laisser prendre ses empreintes digitales, l’intellectuel de profession, le parasite intellectuel, toujours complice du pouvoir, même quand il paraît le combattre, ripostait avec dédain que ce préjugé contre la Science risquait de mettre obstacle à une admirable réforme des méthodes d’identification, qu’on ne pouvait sacrifier le Progrès à la crainte ridicule de se salir les doigts. Erreur profonde ! Ce n’était pas ses doigts que le petit bourgeois français, l’immortel La Brige de Courteline, craignait de salir, c’était sa dignité, c’était son âme. Oh ! peut-être ne s’en doutait-il pas, ou ne s’en doutait-il qu’à demi, peut-être sa révolte était-elle beaucoup moins celle de la prévoyance que celle de l’instinct. N’importe ! On avait beau lui dire : « Que risquez-vous ? Que vous importe d’être instantanément reconnu, grâce au moyen le plus simple et le plus infaillible ? Le criminel seul trouve avantage à se cacher… » Il reconnaissait bien que le raisonnement n’était pas sans valeur, mais il ne se sentait pas convaincu.
En 1793, lors d'une fête de village des Aldudes, un certain Perkain se fit particulièrement remarquer. Activement recherché par les autorités françaises fraîchement révolutionnaires, probablement à la suite d'interventions en faveur de l'Église, il revint d'exil en Espagne pour relever un défi qui lui avait été lancé. Sa renommée avait fait venir beaucoup de monde (on parle de six mille spectateurs), aussi les gendarmes laissèrent la partie se jouer. Selon la légende, il mena brillamment les points et s'arrêta à midi pour se signer et faire une prière, ultime provocation. À la fin de la partie, il ajusta une pelote au milieu du front du capitaine s'approchant pour l'arrêter et la foule se resserra pour l'aider à s'enfuir. Ce coup d'éclat inspira plusieurs chansons et contes et même en opéra, « Perkain le basque ». Il s'agissait de la première vedette de la pelote basque et, bien que déformée, cette histoire a un fondement véritable. Les joueurs de sa génération sont les premiers dont les noms nous sont parvenus.